Le jugement de la 8ème Chambre du TA de Cergy Pontoise

mercredi 18 mars 2009
par  lp 95
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Tribunal Administratif de Cergy-Pontoise

République Française

Au nom du peuple français

Vu la requête, enregistrée le 21 novembre 2005, présentée par M... demeurant ..... Cergy (95000) ;

M..... demande au Tribunal d’annuler la délibération en date du 29 septembre 2005 par laquelle le conseil municipal de Cergy a accepté de consentir à la fédération musulmane de Cergy un bail emphytéotique sur la parcelle située à l’angle de l’avenue du Hazay et du Mail du Point du Jour, a approuvé le bail emphytéotique à intervenir et à autorisé le maire à signer ledit bail ;

Il soutient que :
- le Tribunal Administratif est compétent ;
- en qualité de citoyen demeurant à Cergy inscrit sur les rôles d’imposition de ladite commune au titre de la fiscalité directe locale, il a intérêt à agir contre cette délibération ;
- la délibération méconnaît les dispositions de l’article L.1311-2 du code général des collectivités territoriales dès lors que la finalité du bail ne tend pas à l’accomplissement d’une mission de service public ou à la réalisation d’une opération d’intérêt général, et de l’article 2 de la loi du 9 décembre 1905 ;

Vu le mémoire, enregistré le 18 janvier 2006, présenté par la commune de Cergy représentée par son maire ; la commune de Cergy conclut au rejet de la requête ;

Elle fait valoir que :
- le requérant n’a pas intérêt à agir dès lors que l’acte attaqué ne l’affecte pas dans des conditions suffisamment spéciales, certaines et directes et que la signature dudit bail n’engage par les finances locales ;
- la délibération ne méconnaît pas les dispositions de l’article L.1311-2 du code général des collectivités territoriales et la loi du 9 décembre 1905 ;

Vu le mémoire, enregistré le 15 février 2006, présenté par M... qui conclut aux mêmes fins que précédemment et par les mêmes moyens ;

Vu l’ordonnance en date du 20 février 2006 fixant la clôture d’instruction au 20 mars 2006, en application des articles R.613-1 et R. 613-3 du code de justice administrative ;

Vu le mémoire, enregistré le 17 mars 2006, présenté par la commune de Cergy représentée par son maire qui conclut aux mêmes fins que précédemment ;

Vu le mémoire, enregistré le 4 avril 2006, présenté par M... ;

Vu les pièces du dossier desquelles il résulte que la requête a été communiquée à la fédération musulmane de Cergy qui n’a pas produit d’observations en défense ;

Vu la note en délibéré, enregistrée le 5 février 2010, présentée par la commune de Cergy ;

Vu la décision attaquée ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code général des collectivités territoriales ;

Vu la loi du 9 décembre 1905 concernant la séparation des Églises et de l’État ;

Vu le code de justice administrative ;

Les partie ayant été régulièrement averties du jour de l’audience ;

Après avoir entendu au cours de l’audience publique du 2 février 2010 :
- le rapport de Mme C..., conseiller,
- et les conclusions de M. K..., rapporteur public ;

Sur les conclusions à fin d’annulation :

Sur la fin de non-recevoir opposée par la commune de Cergy tirée de l’absence d’intérêt à agir de M.... :

Considérant que la requête de M.... est dirigée contre la délibération du conseil municipal de Cergy du 29 septembre 2005 de consentir un bail emphytéotique administratif d’une durée de 99 ans au profit de la fédération musulmane de Cergy, l’approuvant et autorisant le maire à le signer ; que ce bail concerne la parcelle située à l’angle de l’avenue du Hazay et du Mail du Point du Jour, d’une superficie de 2350 m², donnant lieu au versement d’une redevance égale à 0,5% de la valeur vénale du terrain et indexé sur l’indice INSEE du coût de la construction correspondant à un montant de 657,88 euros annuel ; que le requérant se prévaut de sa qualité de contribuable de la commune de Cergy, et de son inscription sur les rôles communaux d’imposition, non contestée en défense ; que la délibération attaquée qui fixe un loyer annuel au titre de la mise à disposition par bail emphytéotique administratif d’un bien immobilier appartenant à la commune de Cergy, emporte nécessairement des conséquences financières sur le budget municipal et par suite, sur le montant des cotisations d’impôt ; que par conséquent, le requérant est recevable, contrairement à ce que soutient la commune de Cergy, en tant que contribuable communal, à contester cette délibération ;

Sur les conclusions à fin d’annulation :

Considérant qu’aux termes de l’article 2 de la loi du 9 décembre 1905 concernant la séparation des Églises et de l’État : "la République ne reconnaît, ne salarie, ni ne subventionne aucun culte" ; que s’il résulte de cette disposition que des collectivités territoriales ne peuvent légalement accorder des subventions à des associations qui ont des activités cultuelles, le principe constitutionnel de laïcité, qui implique neutralité de l’État et des collectivités territoriales de la République et traitement égal des différents cultes, n’interdit pas, par lui-même, l’octroi dans l’intérêt général et dans les conditions définies par la loi, de certaines aides à des activités ou des équipement dépendant des cultes ; qu’aux termes de l’article L.1311-2 du général des collectivités territoriales, dans sa rédaction applicable à la date de la délibération attaquée : "Un bien immobilier appartenant à une collectivité territoriale peut faire l’objet d’un bail emphytéotique prévu à l’article L. 541-1 du code rural, en vue de l’accomplissement, pour le compte de la collectivité territoriale, d’une mission de service public ou en vue de la réalisation d’une opération d’intérêt général relevant de sa compétence (...) " ; qu’il résulte de la combinaison de ces dispositions que la conclusions par une collectivité territoriale d’un bail emphytéotique en vue de l’affectation à une association ayant une activité cultuelle d’un édifice de culte ouvert au public ne peut avoir légalement pour objet ou pour effet de procurer à cette association une subvention directe ou indirecte ; qu’ainsi, la détermination du montant du loyer annuel prévu par un tel bail doit résulter de la prise en compte d’une part, notamment, de la valeur du bien donné à bail, valeur diminuée par la nature même du bail emphytéotique administratif conclu pour l’affectation des droits réels et consentis et d’autre part, notamment, de la valeur du bien de retour à l’échéance du contrat ;

Considérant qu’il ressort des pièces du dossier que la commune de Cergy a acquis le 12 juillet 2005 un terrain dont elle a décidé de donner location, dans le cadre d’un bail emphytéotique administratif, une parcelle d’une superficie de 2350 m² à l’association dénommée "Fédération musulmane de Cergy" en vue de l’édification d’un lieu de culte ; qu’il résulte de l’article 4 de a convention de bail, approuvée par la délibération attaquée, que la location du terrain est consentie pour une durée de 99 années entières et révolues, moyennant un loyer annuel égale à 0,5% de la valeur vénale du terrain, soit un montant initial de 657,88 €, actualisé au 31 décembre de chaque année en fonction de l’évolution de l’indice INSEE du coût de la construction ; que le bail n’indique pas la consistance ou la valeur de la construction que s’engage à édifier, à ses frais, l’association susnommée ; que le bail n’indique pas davantage la destination possible de la construction au terme de la période de location ; que, dans ces conditions, et alors même que le bail stipule que l’association preneuse s’engage à effectuer, à ses frais et sous sa responsabilité, les réparations de toute nature et à respecter sa charte ainsi que celle du conseil français du culte musulman, le bail, eu égard à sa durée et au montant du loyer prévu, ne saurait être regardé comme comportant des contreparties suffisantes pour la commune de Cergy ; qu’il suit de là que ledit bail présente le caractère d’une subvention indirecte à un culte accordée par la commune de Cergy en violation des dispositions précitées de l’article 2 de la loi du 9 décembre 1905 ;

Considérant qu’il résulte de ce qui précède que M.... est fondé à demander l’annulation de la délibération en date du 29 septembre 2005 acceptant de consentir un bail emphytéotique administratif d’une durée de 99 ans au profit à la fédération musulmane de Cergy :

DECIDE

Article 1er : la délibération en date du 29 septembre 2005 par laquelle le conseil municipal de Cergy a accepté de consentir à la fédération musulmane de Cergy un bail emphytéotique sur la parcelle située à l’angle de l’avenue du Hazay et du Mail du point du jour, a approuvé le bail emphytéotique à intervenir et a autorisé le maire à signer ledit bail, est annulée.

Article 2 : Le présent jugement sera notifié à M. ...., à la fédération musulmane de Cergy et à la commune de Cergy.

Copie du présent jugement sera adressée au préfet du Val d’Oise.

Délibéré après l’audience du 2 février 2010,

Mme D..., président,
M.B, premier conseiller, et Mme C., conseiller

Lu en audience publique, le 10 mars 2010.

(...)

La République mande et ordonne au préfet du Val d’Oise en ce qui le concerne et à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun, contre les parties privées, de pourvoir à l’exécution de la présente décision.


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